Le Sahel est confronté à une crise environnementale sans précédent, marquée par l’avancée du désert, des inondations récurrentes et des sécheresses prolongées. Si ces bouleversements climatiques affectent l’ensemble des populations, les adolescentes et jeunes femmes en subissent des conséquences particulièrement lourdes. Un rapport de l’ONG Plan International, intitulé Une tempête qui s’amorce, met en lumière l’aggravation des inégalités de genre face au changement climatique dans cette région.
Le rapport repose sur les témoignages de 472 adolescentes et jeunes femmes du Sahel, ainsi que sur des recherches menées par 25 jeunes co-chercheuses dans 10 pays : le Mali, le Tchad, le Burkina Faso, le Niger, la Gambie, la Guinée, le Cameroun, le Nigeria, le Sénégal et la Mauritanie. Ces États figurent parmi les 30 pays les plus vulnérables au monde en matière d’adaptation climatique.
La désertification, la baisse des précipitations et l’appauvrissement des sols rendent l’agriculture de plus en plus incertaine. « Nous devons souffrir pour manger et boire« , témoigne une adolescente de 15 ans à Ouahigouya, au Burkina Faso. Face à la raréfaction des ressources, certaines familles n’ont d’autre choix que de marier leurs filles précocement afin d’alléger leur fardeau économique. « Si tu n’as rien mangé, tu es obligé de donner ta fille en mariage« , confie une jeune femme de Coyah, en Guinée.
L’éducation des filles en péril
Déjà fragile au Sahel, l’accès à l’éducation pour les filles est encore davantage menacé par le changement climatique. Le temps consacré à la recherche d’eau ou de bois de chauffage empiète sur leur scolarité, et la pression économique pousse de nombreuses familles à privilégier l’éducation des garçons.
Selon le rapport, 59 % des participantes affirment que les conditions climatiques ont accru leur charge de travail domestique, les éloignant ainsi de l’école et les exposant à plus de risques. « En raison des températures élevées, du manque de nourriture et des faibles précipitations, aller à l’école devient un fardeau« , explique une jeune Nigériane.
L’abandon scolaire engendre des conséquences dramatiques : il favorise les mariages précoces, les violences sexistes et la pauvreté intergénérationnelle. « Avec l’augmentation des mariages forcés et des mariages d’enfants, je suis moi-même traumatisée« , confie une adolescente malienne.
Les bouleversements climatiques accentuent également l’insécurité des filles et des jeunes femmes. Le besoin de parcourir de longues distances pour accéder à l’eau ou à la nourriture les expose à un risque accru de violences sexuelles et de harcèlement.
L’accès aux soins de santé, déjà limité, devient encore plus difficile en raison de l’état précaire des infrastructures. « Quand il pleut beaucoup, l’accès au centre de santé devient impossible« , rapporte une jeune fille de Ségou, au Mali. Les complications liées aux grossesses précoces, à la malnutrition et aux maladies transmises par l’eau insalubre restent des défis majeurs pour la santé des adolescentes.
Des initiatives locales portées par des jeunes filles
Face à cette crise, de nombreuses jeunes femmes refusent de rester passives. Au Mali, certaines s’engagent activement dans des initiatives communautaires, telles que la plantation d’arbres ou des campagnes de sensibilisation sur les effets du changement climatique. Cependant, elles manquent de soutien. « Nous voulons lutter contre le changement climatique, mais nous n’avons aucun appui« , déplore une jeune Malienne.
Les participantes au rapport appellent à davantage de financements et de formations pour mener à bien des projets durables. Elles demandent également une meilleure reconnaissance de leur rôle dans l’élaboration des politiques climatiques et sociales.