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Guinée : la campagne de dénigrement russe contre Mamadi Doumbouya

Général Mamadi DOUMBOUYA

Depuis plusieurs mois, une campagne de dénigrement contre le président guinéen, le général Mamadi Doumbouya, semble être orchestrée par des activistes pro-russes. Cela révèle des tensions diplomatiques sous-jacentes entre la Guinée et la Russie.

L’offensive prend diverses formes, allant de l’utilisation de faux comptes sur les réseaux sociaux à l’implication de personnalités publiques pro-russes telles que Nathalie Yamb.

Dans plusieurs publications, Nathalie Yamb s’attaque au général Mamadi Doumbouya. Le 25 janvier dernier, lors de la visite du président guinéen au Rwanda, elle a commenté l’affiche ainsi : « L’auto-proclamé général Mamadi Doumbouya en visite de travail et d’amitié chez Kagame. Il manque juste les drapeaux français et américain. » À travers ce post au ton sarcastique, Nathalie Yamb met en évidence le rapprochement de ces pays avec l’Occident.

Dans une autre publication en date du 29 janvier 2024, elle s’en prend encore au président de la transition guinéen.

L’objectif semble être de discréditer le général Mamadi Doumbouya auprès des populations africaines et de son propre peuple. Cette campagne de dénigrement s’est intensifiée à partir de février 2024, marquée par des événements clés. Tout d’abord, des sources ouvertes ont révélé que Mamadi Doumbouya, président de la Guinée, cherchait à réduire l’influence de la société minière russe Nordgold au sein de la Société minière de Dinguiraye. Cette démarche aurait irrité les Russes, touchant ainsi leurs intérêts économiques dans la région.

De plus, le refus affirmé du président Doumbouya de rejoindre l’Alliance des États du Sahel (AES), composée de trois pays où la milice privée russe Wagner est active, semble avoir déclenché une réaction hostile de la part de la Russie. Cette décision pourrait être perçue comme une remise en question de l’influence russe dans la région sahélienne.

La Russie, à travers cette campagne, tente de fragiliser le président Doumbouya et de le présenter comme un obstacle à ses intérêts géopolitiques en Afrique de l’Ouest. Cependant, l’efficacité de cette stratégie reste à déterminer, alors que le président guinéen continue de consolider son pouvoir et de poursuivre ses propres agendas politiques.

Les Russes à la manœuvre depuis 2022

Les tentatives de rapprochement n’ont pas donné de résultats probants pour les Russes. Selon Jeune Afrique, des diplomates russes ont rencontré discrètement en février 2022 le président de la transition guinéen, sans succès.

Après des échecs cuisants pour attirer Doumbouya dans leur giron, la Russie intensifie sa campagne de dénigrement contre lui, ciblant tous les aspects de sa légitimité. Cela inclut ses affiliations présumées à la France, à l’Occident, à la Côte d’Ivoire, et même des attaques contre sa femme, de nationalité française.

Même si la campagne a pris de l’ampleur en 2024, dès 2022, ce compte fictif publiait ceci : « Ce chien était agent de sécurité en France, il n’a pas eu son brevet à Kankan (ndlr une ville guinéenne) », avant de renchérir avec des invectives : « un traître, un drogué, un narco ! Les soldats patriotes, il n’est pas légitime pour vous commander, abattez ce chien. »

Un autre compte publiait le même genre de message le 20 janvier 2023 : « Le colonel Mamadi appartient à la légion étrangère et son épouse est française. Ce qui en fait quelqu’un de plus proche de la France que de la Russie. »

Cette offensive ne se limite pas à une seule tactique. Les trolls russes semblent avoir déployé une stratégie multi-facette, utilisant une variété d’éléments de langage pour semer le doute et affaiblir la position du président guinéen. En effet, des faux comptes sur les réseaux sociaux ont été activement impliqués dans la diffusion de messages visant à discréditer le président Doumbouya, en exploitant des théories de conspiration et en répandant de fausses informations.

Des indices suggèrent que cette campagne de désinformation a été planifiée depuis longtemps. Bien que des signes précurseurs de cette offensive soient apparus dès la fin de l’année 2023, elle semble avoir été pleinement déployée à partir du 8 février 2024. Cette date marque un tournant dans l’intensité et la coordination de l’attaque contre le président guinéen.

En ciblant ses supposées affiliations avec des puissances étrangères telles que la France, l’Occident et la Côte d’Ivoire, ainsi que sa relation conjugale avec une ressortissante française, les initiateurs de cette campagne cherchent à ébranler la légitimité et la crédibilité du président Doumbouya auprès de ses concitoyens et sur la scène internationale.

Dans l’ensemble, cette campagne de dénigrement souligne les tensions géopolitiques croissantes entre la Russie et la Guinée, ainsi que les enjeux stratégiques qui sous-tendent ces manœuvres d’influence sur le continent africain.